Tome de la vieJe sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
Et les ressacs et les courants : je sais le soir,
L’Aube exaltée ainsi qu’un peuple de colombes,
Et j’ai vu quelquefois ce que l’homme a cru voir !
J’ai vu le soleil bas, taché d’horreurs mystiques,
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très antiques
Les flots roulant au loin leurs frissons de volets !
J’ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baisers montant aux yeux des mers avec lenteurs,
La circulation des sèves inouïes,
Et l’éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !
vies et exploitsTu l'as dit : C'en est fait ; ni fuite ni refuge
Devant l'assaut prochain et furibond des flots.
Ils avancent toujours. C'est sur ce mot, Déluge,
Poète de malheur, que ton livre s'est clos.
Mais comment osa-t-il échapper à ta bouche ?
Ah ! pour le prononcer, même au dernier moment,
Il fallait ton audace et ton ardeur farouche,
Tant il est plein d'horreur et d'épouvantement.
Vous êtes avertis : c'est une fin de monde
Que ces flux, ces rumeurs, ces agitations.
Nous n'en sommes encore qu'aux menaces de l'onde,
À demain les fureurs et les destructions.